Diagnostic structurel des immeubles collectifs : mode d’emploi pour copropriétés et maîtres d’ouvrage

Maitre Jean-Marie DE POULPIQUET

Il était très attendu dans le domaine de la construction. Le décret n° 2025-814 du 12 août 2025 est désormais en vigueur.

Il vient préciser les contours du diagnostic structurel obligatoire dans certains secteurs délimités par les communes. Qui est concerné, à quel rythme, par qui et avec quels livrables ? Que change la possibilité de substituer ce diagnostic par un projet de plan pluriannuel de travaux (PPPT) en copropriété ?

Avec ce nouveau décret, les communes peuvent délimiter des secteurs où les immeubles collectifs doivent réaliser un diagnostic structurel. La délibération est annexée au PLU dans un délai de trois mois et notifiée aux propriétaires ou syndics. À compter de cette notification, les intéressés disposent de 18 mois pour transmettre le rapport à la commune.

En copropriété, le PPPT élaboré par un professionnel répondant aux mêmes exigences de compétence et d’assurance peut tenir lieu de diagnostic. En cas de carence, le maire peut faire réaliser d’office le diagnostic aux frais des propriétaires.

Dans cet article, nous faisons le point sur les évolutions du diagnostic structurel obligatoire.

Actualité juridique numéro 1

1) Pourquoi faut-il réaliser un diagnostic structurel ?

Le diagnostic structurel répond à un objectif simple : prévenir les risques d’effondrement et sécuriser les occupants et les tiers dans les tissus d’habitat ancien ou dégradé.

Après plusieurs accidents marquants, la loi « Habitat dégradé » du 9 avril 2024 a confié aux communes un pouvoir d’initiative : cartographier les secteurs à risque et déclencher, à intervalles réguliers, un contrôle de la solidité des immeubles (voir article L.126-6-1 du Code de la construction et de l’habitation). Le décret du 12 août 2025 vient ainsi fixer les modalités opérationnelles dans la continuité de ces évolutions législatives (contenu du rapport, compétences des intervenants, procédures d’information).

2) Qui est concerné et à quel moment ?

Sont visés par ce dispositif les bâtiments d’habitation collectifs situés dans les secteurs délimités par délibération du conseil municipal. Cette délibération est annexée au PLU, au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale dans les trois mois, puis notifiée aux propriétaires ou aux syndics (qui informent à leur tour les copropriétaires).

À défaut, un affichage en mairie et sur la façade du bâtiment vaut notification.

À compter de la notification (ou de la date d’affichage la plus tardive), le délai court pendant 18 mois pour faire réaliser le diagnostic et transmettre le rapport à la commune. Par la suite, la loi prévoit une périodicité au moins décennale après 15 ans depuis la réception des travaux.

3) Que doit contenir le diagnostic ? Quelles compétences exiger ?

La personne qui réalise le diagnostic doit justifier de certaines compétences dans ce domaine : modes constructifs, calculs et modélisation, géotechnique, pathologies, normes de sécurité. Elle doit en outre disposer d’une assurance RC pro et faire preuve d’indépendance et d’impartialité.

Le rapport, remis au format numérique, comprend a minima l’identification de l’intervenant et de sa couverture d’assurance, la description du bâtiment (type, époque, implantation), l’inventaire des éléments structurels et désordres observés, ainsi que l’analyse des derniers travaux et, le cas échéant, des recommandations : investigations complémentaires, mesures de sécurisation et liste hiérarchisée de travaux.

Dans la pratique, la mission ne se limite pas à une simple visite visuelle : elle suppose également un accès aux archives techniques. Le propriétaire ou le syndicat des copropriétaires doit remettre les PV d’AG, descriptifs, plans, diagnostics existants, arrêtés de péril ou de mise en sécurité des dix dernières années, et – si déjà établi – le projet de PPPT.

Dans cette perspective, nous vous conseillons donc d’anticiper ces flux documentaires dès la commande pour éviter les retards.

4) Peut-on substituer ce diagnostic par un PPPT ?

Oui. L’article L.126-6-1 du CCH prévoit qu’en copropriété, l’obligation de diagnostic peut être satisfaite par l’élaboration du PPPT (Projet de plan pluriannuel de travaux), à condition toutefois que le professionnel réponde aux mêmes exigences de compétence et de garanties que pour un diagnostic structurel.

Le PPPT est alors transmis à la commune dans le même délai de 18 mois. Cette solution a le mérite d’éviter un doublon d’études si la copropriété a déjà programmé sa rénovation.

Attention toutefois de bien vérifier le périmètre de la mission PPPT (prise en compte explicite de la solidité et des désordres structurels). Dans le doute, le complément d’analyse structurelle doit être contractualisé.

5) Quels sont les effets concrets de ces évolutions ?

L’annexion des périmètres de secteurs au PLU ou à la carte communale améliore la publicité et la traçabilité des obligations dans les secteurs concernés.

Sur le terrain, les syndics doivent inscrire la démarche à l’ordre du jour de l’AG, organiser l’accès aux parties communes, cadrer les autorisations d’intervention et planifier le retour en AG sur les préconisations du rapport.

Du côté des collectivités, la notification déclenche le délai et facilite les suites en cas de carence (réalisation d’office, recouvrement des frais comme en matière de contributions directes).

6) Quels impacts contractuels et assurantiels ?

Dans vos contrats de diagnostic ou accords-cadres, il convient de préciser le périmètre concerné (éléments visitables, investigations supplémentaires sur ordre), les délais de restitution compatibles avec l’échéance des 18 mois, les conditions d’accès (clés, nacelles, sondages), la propriété et la réutilisation des livrables, l’assurance de l’intervenant et sa déclaration d’indépendance.

Dans les CCTP de travaux, il faudra rappeler que les préconisations structurelles issues du rapport s’imposeront à la programmation et au phasage, ce qui exige aussi de prévoir les interfaces avec les diagnostics complémentaires (géotechnique, réseaux). Informez votre assureur (RC pro / DO / décennale) des désordres caractérisés et des mesures conservatoires recommandées.

Les questions les plus fréquentes

Le diagnostic bloque-t-il la location ?

Non, le diagnostic est un outil d’évaluation. En cas de désordres graves, des mesures de police ou de sécurisation peuvent s’imposer, et des travaux peuvent être décidés ; mais l’obligation porte d’abord sur la réalisation et la transmission du diagnostic (ou du PPPT).

Qui paie ?

Le diagnostic est à la charge des propriétaires ou du syndicat des copropriétaires. En cas de carence, la commune peut faire réaliser d’office et recouvrer le coût comme en matière de contributions directes.

Que faire hors secteur communal ?

Si l’immeuble n’est pas situé dans un périmètre délimité, l’obligation spécifique ne s’applique pas. Rien n’empêche cependant de commander volontairement un diagnostic structurel (ou d’étendre le DTG/PPPT) lorsqu’un risque est suspecté.

Le PPPT remplace-t-il toujours le diagnostic ?

Oui en copropriété et sous conditions : compétences et garanties identiques à celles exigées pour le diagnostic structurel, et transmission du projet de PPPT à la commune dans le même délai. À défaut, réalisez un diagnostic dédié.

Conclusion

Le nouveau cadre confère aux communes et aux acteurs privés un outil opérationnel pour détecter les fragilités et agir avant le sinistre.

Pour les professionnels du secteur, l’enjeu n’est pas de pure forme. Il s’agit pour eux de transformer ce rapport en plan d’action, avec un calendrier de sécurisation et de travaux réaliste, compatible avec la gouvernance de copropriété et les contrats de maîtrise d’œuvre et d’entreprises.

Pour sécuriser vos opérations dans ce contexte, faites appel à Maître de Poulpiquet pour un audit de la situation, de vos contrats en cours et des conseils adaptés à la situation de votre immeuble collectif.

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